Delphes
Le site est grandiose, abrupt, aux flancs du Mont Parnasse fréquenté par les muses, surplombant les eaux bleues du golfe de Corinthe. Aux temps obscurs se dressait là un temple dédié à Gaïa, la déesse mère, ancêtre de tous les dieux, près d'une source aujourd'hui tarie. Mais un jour, le bel Apollon s'empara des lieux en tuant le gardien, le serpent Python, le propre fils de son arrière grand-mère, mettant ainsi fin au règne du matriarcat pour le remplacer par un patriarcat phallocrate qui dure encore trois mille ans après. (enfin pas partout parce que dans des coins reculés de la Chine et aussi en Bretagne les anciennes habitudes ont la vie dure. Je peux en témoigner.)
Pour se faire pardonner, Apollon instaura un oracle délivré par la Pythie, prêtresse visionnaire, ancêtre de madame Soleil, et traduit bien sûr par des prêtres. Les bonnes femmes on ne peut pas leur faire confiance, tout le monde le sait. Elles racontent souvent n'importe quoi. Tous les puissants de l'époque y venaient se faire dire la bonne aventure avant de prendre de grandes décisions. Exactement comme aujourd'hui d'ailleurs où le président ne décide qu'après avoir consulté le conseil scientifique composé de prêtres d'Esculape qui interprètent les paroles de la Pythie-Salpétrière.
Ce juteux commerce fut interdit quand les Chrétiens prirent le pouvoir et le site abandonné aux pillages et aux tremblements de terre. Ce n'est qu'à la fin du XIXeme siècle de des fouilles furent entreprises par l'Ecole Française d'Athènes pour retrouver le site sur lequel avait été construit tout un village.
Apollon est un Dieu aux vertus contradictoires. S'il est le dieu de la médecine, ses flèches peuvent aussi déclencher la peste. Au lieu de fouiller du côté de Wuhan, on devrait compter combien il en reste dans son carquoi.
Les anciens grecs considéraient Delphes comme le centre du monde. En témoigne l'Omphalos, une pierre censée représenter le nombril du monde. Salvador Dali le situait pour sa part à la gare de Perpignan, et une bande d'allumés à Pougne-Hérisson, dans les Deux-Sèvres. Je ne sais plus qui disait que l'univers est un cercle dont le centre est partout et la circonférence nulle part. En ce qui concerne l'Omphalos, certains y voient la représentation du ventre d'une femme enceinte, en relation avec le mythe oriental de "l'oeuf du monde" dont tout l'univers serait sorti.(Pas si éloigné de la théorie du Big-bang)
A l'heure où le culte de Gaïa reprend des couleurs (surtout du vert), Apollon n'a qu'à bien se tenir.