Des pierres dans mon jardin
J'ai longtemps cru que pour créer un jardin, il suffisait de planter des végétaux. Mais instinctivement j'ai toujours introduit dans mes jardins deux éléments qui me tiennent à coeur : l'eau et la roche.
Les japonais ont été capable de créer des jardins entièrement minéraux, de sable et de rochers. Je ne pourrais pas vivre dans un tel environnement, même si je le trouve esthetiquement parfait. Je suis trop attaché à l'exubérance du végétal.
En créant mon petit jardin de tigwenn, j'ai eu la chance de récupérer cinq énormes boules de granite.
Le placement de ces rochers pesant pour certains plusieurs tonnes n'a pas été chose aisée. Le plus énorme a cependant trouvé sa place comme s'il avait été toujours là. Il s'est retrouvé à demi enterré et ainsi il évoque le socle primitif émergeant de la terre. Un oriental l'aurait appelé le dos du dragon.
Une pierre qui a une longue histoire semble toujours posséder une vie propre. Que ce soit un rocher ou un simple galet, on l'imagine aussi vielle que la terre. Sculptée par le soleil et la pluie, colonisée par les lichens et les mousses, on pourrait la croire dotée de mémoire. Ambassadrice des forces telluriques, elle nous rassure par sa sérénité et sa permanence.
Quand la pierre a été travaillée par la main de l'homme, elle ne perd rien de sa force. Quand elle a retrouvé sa patine et son écorce de mousses et de lichen, elle rayonne à nouveau sa puissance évocatrice. Elle peut être statue, mur, auge. Un message nouveau est en elle : une oeuvre humaine peut s'inscrire dans la nature et comme tout chose en ce monde elle sera transformée par le temps, par la vie, mais il en subsistera quelque chose, ne serait-ce que le souvenir inscrit dans la pierre.